Quelques Savants de ce siècle, sur la foi des rapsodies arabesques, ont entrepris de le venger de l’injustice que lui font nos écrivains. Et le troisième ? Ils avaient, dit-on, la simplicité des temps héroïques ; mais qu’est-ce que les siècles héroïques ? Son père use de son influence auprès de ses anciens clients pour fléchir le Régent qui remplace Tulle par Sully-sur-Loire, où Arouet fils s’installe dans le château du jeune duc de Sully, une connaissance du Temple, qui vit avec son entourage dans une succession de bals, de festins et de spectacles divers. Dire que quelque chose est hors de lui, ce serait dire qu'il y a quelque chose hors de l'infini. À la Comédie-Française, l’enthousiasme redouble. La matière de l'univers appartient donc à Dieu tout autant que les idées, et les idées tout autant que la matière. C’est par une tromperie philosophique que s’engagera la fin d’une l’idylle de dix ans : la marquise renonce au matérialisme newtonien pour lui préférer le déterminisme optimiste de Leibniz, ce à quoi Voltaire ne saurait consentir. Sur son parcours, une foule énorme l’entoure et l’applaudit. Dans l’Article « Viande » du Dictionnaire philosophique, Voltaire montre que Porphyre regardait « les animaux comme nos frères, parce qu'ils sont animés comme nous, qu'ils ont les mêmes principes de vie, qu'ils ont ainsi que nous des idées, du sentiment, de la mémoire, de l'industrie. Largement inspiré par Voltaire, l’article « Genève »[48] de d’Alembert paru dans le volume VII en 1757 fait scandale auprès du clergé genevois. Chez lui l’usure avec les étrangers est défendue, l’aumône ordonnée. Villette, s’apercevant que le domaine est lourdement déficitaire, le revend en 1785. » (cité par René Pomeau, Il ne dit pas qu'il est catholique, mais «, Condamné à mort ainsi que sa femme pour parricide sans aucune preuve, ni même aucun indice sérieux, Monbailli est exécuté en 1770. Il aime l’argent, le luxe, le monde, le théâtre. Au contraire, Voltaire n'a cessé de juger ces mœurs contre nature, dangereuses, infâmes », « Voltaire, il faut s’y résoudre, est à la fois, Cet extrait doit être lu avec les références du, « si Voltaire fut un ardent judéophobe, les idées que lui et les encyclopédistes représentaient n’étaient pas hostiles aux Juifs, puisque c’étaient des idées de liberté et d’égalité universelle », « Ma pièce représente, sous le nom de Mahomet, le prieur des Jacobins mettant le poignard à la main de, « un prétexte à dénoncer l’intolérance des chrétiens - catholiques de stricte observance, jansénistes, protestants - et les horreurs perpétrées au nom du Christ », « les traits qui révèlent en Mahomet le grand homme », « porte un jugement presque entièrement favorable », « le législateur des musulmans, homme puissant et terrible, établit ses dogmes par son courage et par ses armes », « réfuter radicalement, en citant longuement les textes sacrés, les accusations de misogynie qui pesaient à l’époque sur l’Islam », « dans nos siècles de barbarie et d’ignorance, qui suivirent la décadence et le déchirement de l’Empire romain, nous reçûmes presque tout des Arabes : astronomie, chimie, médecine », « dès le second siècle de Mahomet, il fallut que les chrétiens d’Occident s’instruisissent chez les musulmans », « l’antipathie que Voltaire éprouvait à l’égard du peuple juif », « inefficacités de la révélation judéo-chrétienne », « tissu d’admiration et de mauvaise foi mal dissimulé », « fanatisme et l’intolérance du christianisme et du judaïsme », « Tant qu’il y aura des fripons et des imbéciles, il y aura des religions. Le mécanisme de l’opération est résumé par René Pomeau dans. Après l’échec d’une deuxième tragédie, Artémire, il connaît un nouveau succès en 1723 avec La Henriade, poème épique de 4 300 alexandrins se référant aux modèles classiques (Iliade d'Homère, Énéide de Virgile) dont le sujet est le siège de Paris par Henri IV et qui trace le portrait d’un souverain idéal, ennemi de tous les fanatismes : vendu à 4 000 exemplaires en quelques semaines, ce poème connaîtra soixante éditions successives du vivant de son auteur. La critique de la civilisation, la dénonciation du « luxe », de l’inégalité sociale et de la propriété, l’exaltation du primitivisme de Rousseau ne peuvent que rencontrer l’incompréhension de Voltaire. On accusait son père et sa mère de l’avoir assassinée pour l’empêcher de se convertir. Selon lui, ce sentiment se serait aggravé dans les quinze dernières années de la vie de Voltaire. Voltaire tire de cette doctrine la ligne directrice de sa morale : la tâche de l’homme est de prendre en main sa destinée, d’améliorer sa condition, d’assurer, d’embellir sa vie par la science, l’industrie, les arts et par une bonne « police » des sociétés. L’historien de la Shoah, Léon Poliakov[129] fait de Voltaire, « le pire antisémite français du XVIIIe siècle »[130]. Dans sa lettre du 26 juillet 1769 à la duchesse de Choiseul, il dit bien crûment : « Il y a dans le royaume des Francs environ trois cent mille fous qui sont cruellement traités par d’autres fous depuis longtemps ». Tout au long de sa vie, Voltaire fréquente les Grands et courtise les monarques, sans dissimuler son dédain pour le peuple, mais il est aussi en butte aux interventions du pouvoir, qui l’embastille et le pousse à l’exil en Angleterre ou loin de Paris. Et il se lance dans le combat pour la réhabilitation. Il est profondément impressionné par l'esprit de liberté qu'il voit dans la société anglaise (ce qui ne l'empêche pas d'apercevoir les ombres du tableau, surtout vers la fin de son séjour). Spear Frederick A. avec la participation de Elizabeth Kreager. Un poème, où il fait l’apologie du luxe (« Le superflu, chose très nécessaire »), Le Mondain, et évoque la vie d’Adam[28], scandalise à Paris les milieux jansénistes. Enfin je ne crois pas qu'il soit possible d'imaginer une espèce plus ridicule à la fois plus abominable, plus extravagante et plus sanguinaire ». Achevée en 1776, la statue, objet de critiques, ne fut pas exposée au public. Le mahométan lui crie : « Prends garde à toi si tu ne fais pas le pèlerinage à La Mecque ! En fait, cette lettre existe, mais la phrase n’y figure pas, ni même l’idée[83]. de quatre pages qui a circulé vers 1734-1735 (donné par René Pomeau dans, « On suppose dans ce pernicieux libelle », « qu'Adam caressait sa femme dans le paradis terrestre ; or dans les anecdotes de sa vie trouvées par Saint-Cyprien, il est dit expressément que le bonhomme ne bandait point, et qu'il ne banda qu'après avoir été chassé et de là vient le mot bander de misère. Émilie est une véritable femme de sciences. Dans sa préface de la réédition de l’ouvrage de Poliakov, « Mahomet le fanatique, le cruel, le fourbe, et, à la honte des hommes, le grand, qui de garçon marchand devient prophète, législateur et monarque. « L'amitié d'un grand homme est un bienfait des dieux, « Nos prêtres ne sont pas ce qu’un vain peuple pense / Notre crédulité fait toute leur science, L'incident est raconté, avec quelques variantes, par deux récits contemporains : celui de Mathieu Marais dans deux lettres de février 1726 au, Lorsque les Jésuites furent bannis de France, en 1764, Voltaire recueillit chez lui, à Ferney, un autre ancien professeur dont il fit son aumônier, le père Antoine Adam (1705-1787), Le rapport de Beauregard au lieutenant de police, qui a été conservé, est détaillé dans le tome 1 de, « Comment ! Jamais, depuis le jour de la Saint-Barthélemy, rien n’a tant déshonoré la nature humaine. Son œuvre comprend aussi des contes, notamment Candide ou l'Optimisme, des Lettres philosophiques, le Dictionnaire philosophique et une correspondance monumentale dont nous connaissons plus de 15 000 lettres sur un total parfois estimé à 40 000[1]. Je les laisse avec Mme Denis qui fait les honneurs, et je m’enferme », « Rien n'anime plus la société, rien ne donne plus de grâce au corps et à l'esprit, rien ne forme plus le goût », « Ce sang innocent crie, et moi je crierai aussi ; et je crierai jusqu’à ma mort », « Il faut dans cette vie combattre jusqu’au dernier moment », « Est-ce qu’on ne peut pas faire taire cet homme-là ? Cette fortune s’accrut ensuite par des héritages, mais plus encore par le commerce de Cadix, et par la souscription faite à Londres pour La Henriade. S'étant lié d'amitié avec un certain Beauregard, en réalité un indicateur de la police chargé de le faire parler, il lui confie être l'auteur de nouveaux ouvrages de vers satiriques contre le Régent et sa fille[13]. Voltaire n'apporte à ce sujet que cette précision : « La terre est couverte de crimes (...) ; cela empêche-t-il qu'il y ait une cause universelle ? Voltaire répond par un libelle anonyme (Rousseau n’a jamais su qu’il en était l’auteur), le Sentiment des Citoyens où il suggère l'exécution de Rousseau, révélant que l’auteur de l’Émile a fait porter et déposer ses cinq enfants (qu’il a eus avec Thérèse Levasseur) aux Enfants-trouvés : « si on châtie légèrement un romancier impie, on punit capitalement un vil séditieux »[109]. Théiste, Voltaire n'en condamne pas moins fermement les religions dévalorisant, selon lui, la vie, la nature et les relations sociales et familiales : « Pensées de Blaise Pascal : « S’il y a un Dieu, il ne faut aimer que lui, et non les créatures. Mais des renseignements lui parviennent et, le 4 avril, il écrit à Damilaville : « Il est avéré que les juges toulousains ont roué le plus innocent des hommes. Son état de santé et son humeur changent pourtant d’un jour à l’autre. Voltaire lui répond ironiquement : « J’ai reçu, Monsieur, votre nouveau livre contre le genre humain, je vous en remercie (…) On n’a jamais tant employé d’esprit à vouloir nous rendre bêtes ; il prend envie de marcher à quatre pattes quand on lit votre ouvrage. « L’antisémitisme n’a jamais cherché sa doctrine chez Voltaire »[132], indique ainsi Roland Desné, qui écrit : « Il est non moins vrai que ce n’est pas d’abord chez Voltaire qu’on trouve des raisons pour combattre l’antisémitisme. Il y meurt à 83 ans. Dans ses lettres[93], Voltaire déclare qu'il « ne mange plus de viande » « ni poisson », se définissant encore plus « pythagoricien » que Philippe de Sainte-Aldegonde, un végétarien qu'il reçut à Ferney, à côté de Genève. Cet homme valait mieux que tous ses ennemis ensemble ; mais je n’ai jamais approuvé ni les erreurs de son livre, ni les vérités triviales qu’il débite avec emphase. La nôtre est sans contredit la plus ridicule, la plus absurde, et la plus sanguinaire qui ait jamais infecté le monde », « très barbare [qui] ordonne que ces jours-là on mangera les, « Nous ne valons pas grand’chose, mais les huguenots sont pires que nous, et de plus ils déclament contre la comédie », « Il y a dans le royaume des Francs environ trois cent mille fous qui sont cruellement traités par d’autres fous depuis longtemps », Au sens que l'on donnait à ce mot dans la France du, « Caumartin porte en son cerveau / De son temps l’histoire vivante / Caumartin est toujours nouveau / À mon oreille qu’il enchante », La duchesse et ses amis seront arrêtés en 1718 dans le cadre de la. Puis, il part à Nancy spéculer sur des actions émises par le duc François III de Lorraine, qui introduit la franc-maçonnerie en Autriche, opération dans laquelle il aurait « triplé son or »[20]. La marquise sauve plusieurs fois Voltaire des conséquences de ses insolences, et Voltaire éponge parfois les colossales dettes de jeu d’Émilie. Ce sont, entre autres, le Songe de Platon, Micromégas, Le Monde comme il va, Zadig, Les Deux Consolés, Candide, l’Histoire d'un bon bramin, Jeannot et Colin, L'Ingénu, L'Homme aux quarante écus, Le Taureau blanc, Les Dialogues d'Evhémère, La Princesse de Babylone. Voltaire est élu à l'Académie française le 2 mai 1746, il meurt à l'âge de 83 ans à Paris le 30 mai 1778. Il lui sert de chapelain et de partenaire aux échecs. L’Académie en corps vient l’accueillir dans la première salle. Égotiste, il se livre intimement dans ses Confessions. Van der Cruysse considère le discours voltairien sur Mahomet comme un « tissu d’admiration et de mauvaise foi mal dissimulé » qui vise moins le prophète lui-même que les spectres combattus par Voltaire à savoir le « fanatisme et l’intolérance du christianisme et du judaïsme »[163]. Il envisage son retour à Ferney pour Pâques, mais il se sent si bien à Paris qu'il pense sérieusement à s'y fixer. Cette vitrine de conservation met en évidence la collection de violons classiques d’Henry Ford. En 1768, l'impératrice Catherine II lui commande un cycle de peintures voltairiennes dont neuf toiles sont conservées au musée de l'Ermitage. C’est un poème, ou une espèce de prose rimée, qui contient six mille vers. Voltaire rédige l’exposé détaillé de l’affaire, fait ressortir le scandale, provoque un revirement de l’opinion. Selon certains historiens et son autobiographie, il gagne un capital important, sur une idée du mathématicien La Condamine, en participant à une loterie d’État mal conçue[19]. En leur compagnie, il se persuade qu’il est né grand seigneur libertin et n’a rien à voir avec les Arouet et les gens du commun. Voltaire le suit le 11 juillet. Voltaire possédait néanmoins un « gros portefeuille » d'actions de la compagnie des Indes, qui pratiqua la traite négrière[123]. Voltaire perd sa mère à l’âge de sept ans. Principaux extraits de Voltaire. L’affrontement est cependant resté courtois jusqu’à la véritable déclaration de guerre (publiée plus tard dans les Confessions, livre X) que Rousseau adresse à Voltaire le 17 juin 1760 : « Je ne vous aime point, Monsieur ; vous m’avez fait tous les maux qui pouvaient m’être les plus sensibles, à moi, votre disciple et votre enthousiaste. Mais son éloignement ne dure pas. Rousseau s’occupe à la recherche de tout ce qui peut nous être utile, et s’efforce de bâtir ». t. 2. (...) Il y a une suite infinie de vérités, et l'Être infini peut seul comprendre cette suite. L’attachement de Voltaire à la liberté d'expression serait illustré par la très célèbre citation qu’on lui attribue à tort : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire ». Il reste pauvre, persuadé qu’il se met moralement du bon côté et gagne son pain en copiant de la musique. Magnifiquement logé dans l’appartement du maréchal de Saxe, il travaille deux heures par jour avec le roi qu’il aide à mettre au point ses œuvres. Mais Rousseau participe au combat philosophique, c’est un ami de Diderot et d’Alembert, un collaborateur de l’Encyclopédie. […] Mais paraît-il parmi vous quelque livre nouveau dont les idées choquent un peu les vôtres (supposé que vous ayez des idées), ou dont l’auteur soit d’un parti contraire à votre faction, ou, qui pis est, dont l’auteur ne soit d’aucun parti : alors vous criez au feu ; c’est un bruit, un scandale, un vacarme universel dans votre petit coin de terre. Evremond, B la tradition libertine que Voltaire connut dks sa jeunesse, g son sCjour en Angleterre de 1726 B 1729 et ii son mode de vie Cpicurien h Cirey.8 Georges Ascoli a complCtC cette filiation,%t Ira 0. »[127]. Il n’est libéré, deux semaines plus tard, qu’à la condition qu’il s’exile. ». John Locke apparaît comme le défenseur du libéralisme en affirmant que le pacte social ne supprime pas les droits naturels des individus. De Voltaire » (1 ). De son vivant, ses Œuvres complètes comptent 40 volumes in-8° (édition de Genève de 1775). En 1745, Voltaire devient, à cinquante ans, l’amant de sa nièce (l’une des deux filles de sa sœur aînée) Marie-Louise Denis. ), et considère que la bienveillance hindoue envers les animaux est un choix qui rend complètement honteux la malveillance générale soutenue par l'impérialisme européen, colonial et esclavagiste[176]. S'ensuit une comédie (avec de nombreux épisodes et une profession de foi non signée) à l'issue de laquelle Voltaire se faisant passer pour moribond réussit à communier. Pour cinq ou six pages dont il n’est plus question au bout de trois mois. « Si ces Ismaélites [les Arabes, qui, selon la Bible, descendent d'Ismaël] ressemblaient aux Juifs par l'enthousiasme et la soif du pillage, ils étaient prodigieusement supérieurs par le courage, par la grandeur d'âme, par la magnanimité […] Ces traits caractérisent une nation. Enfin libéré, il peut quitter Francfort le 8 juillet. Le public apprécie ses vers en forme de maximes[n 10] et ses allusions impertinentes au roi défunt et à la religion[n 11]. Voltaire s'empresse de relever le défi.